La réponse édentée de la Chine à la guerre entre Israël et le Hamas
À l’aube du 7 septembre, le Hamas a lancé des milliers de roquettes vers Israël et envoyé des hommes armés traverser la frontière depuis la bande de Gaza. Israël est toujours en train de déloger les militants, mais a signalé jusqu’à présent plus de 900 morts ; 130 autres personnes ont été capturées par le groupe militant palestinien, qui menace de les exécuter.
La réponse d’Israël a été féroce, avec des bombardements sans précédent sur Gaza et une déclaration officielle de guerre. Plus de 670 Palestiniens ont été tués lors de la contre-attaque israélienne, et de nombreux autres décès pourraient suivre alors qu’Israël se prépare à une attaque terrestre. Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a également appelé à un siège complet du territoire, affirmant que « ni l’électricité, ni la nourriture, ni le carburant » ne seraient autorisés à entrer à Gaza.
Comment la Chine a-t-elle réagi à la violence actuelle ?
La déclaration initiale de la Chine a pris la forme d’un communiqué de presse du ministère des Affaires étrangères du 8 octobre, qui disait : «La Chine est profondément préoccupée par l’escalade actuelle des tensions et de la violence entre la Palestine et Israël. Nous appelons les parties concernées à rester calmes, à faire preuve de retenue et à mettre immédiatement fin aux hostilités afin de protéger les civils et d’éviter une nouvelle détérioration de la situation. La déclaration était remarquable par sa fadeur ; le ministère des Affaires étrangères s’est abstenu de critiquer spécifiquement le Hamas ou Israël. Les appels à « protéger les civils » pourraient vraisemblablement viser soit les contre-attaques israéliennes en cours, qui font de lourdes conséquences sur la population civile de Gaza, soit le Hamas, qui continue de prendre en otage des civils israéliens – y compris des enfants et des personnes âgées.
La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a développé ce point lors de sa conférence de presse du 9 octobre (d’ailleurs, la première conférence de presse régulière depuis que la Chine a célébré la fête nationale de la mi-automne et la fête nationale). Cependant, les grandes lignes de la position chinoise – un appel sans force au « calme » et à la « retenue » et un refus obstiné de rejeter la faute – n’ont pas changé. Mao a déclaré que la Chine était « profondément attristée par les pertes civiles et s’opposait et condamnait les actes qui nuisent aux civils », sans préciser quels étaient ces « actes ». Elle a également exprimé l’opposition de la Chine aux « mesures qui aggravent le conflit et déstabilisent la région ».
Au lieu de cela, la Chine semble adopter une vision à long terme, appelant à un retour aux pourparlers de paix et à la mise en œuvre de la solution à deux États « pour mettre fin au cycle de conflit entre la Palestine et Israël ». Dans ce cadre, Mao a soulevé l’un des problèmes de la Chine nouveaux slogans préférés, insistant sur le fait que « les préoccupations légitimes de chaque partie » soient respectées.
Pour évaluer la réponse de la Chine, il peut être utile de la comparer aux déclarations du secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres. Guterres s’est dit « profondément affligé » par le projet israélien de blocus sur l’ensemble de la population de Gaza, avertissant que « la situation humanitaire à Gaza était extrêmement désastreuse avant ces hostilités ». Cependant, il a également clairement condamné l’attaque du Hamas qui a précédé la réponse d’Israël.
« Je reconnais les griefs légitimes du peuple palestinien. Mais rien ne peut justifier ces actes de terreur et les meurtres, mutilations et enlèvements de civils », a déclaré António Guterres.
Les commentaires de Guterres montrent qu’il est possible d’éviter de prendre parti tout en critiquant les deux parties pour leurs violations du droit international. Ce n’est pas ce que fait la Chine.
La Chine a totalement évité de condamner les premières attaques brutales du Hamas contre des civils, et a même refusé de les qualifier d’« attaques terroristes » à la demande d’un journaliste du journal brésilien O Globo. Il y a là une ironie particulièrement profonde, puisque la Chine elle-même l’a été apoplectique dans le passé lorsque les gouvernements occidentaux ont refusé de qualifier de terrorisme certaines attaques perpétrées par des groupes ouïghours.
Ce que nous voyons ici, c’est que la Chine tente de rester totalement neutre, mais est en conséquence perçue comme prenant le parti du Hamas. En Israël, les appels à un cessez-le-feu tout en refusant de condamner les attaques du Hamas contre des civils israéliens sont certainement interprétés comme une tentative de protéger les militants palestiniens de toute conséquence.
Plus tôt cette année, après avoir réussi à amener l’Iran et l’Arabie Saoudite à une percée, la Chine a commencé à s’ériger en médiateur potentiel dans le conflit israélo-palestinien. Une grande partie de cet effort s’est appuyée davantage sur le soutien traditionnel de la Chine à la Palestine contre l’intensification de l’oppression israélienne. En juin, la Chine a accueilli le président palestinien Mahmoud Abbas À Pékin. Lors de la visite, la Chine et la Palestine ont signé un «partenariat stratégique», promettant une coopération et un financement accrus à l’Autorité palestinienne.
Le soutien de la Chine à la Palestine est l’une des cartes les plus efficaces qu’elle puisse jouer pour tenter de renforcer sa position dans le monde arabe face aux États-Unis. Dans la crise actuelle, ce stratagème géopolitique oblige la Chine à éviter toute critique directe du Hamas. C’est particulièrement ironique, car à première vue, la Chine et Israël ont beaucoup en commun : tous deux sont des États de sécurité de haute technologie qui consacrent une énergie et des ressources immenses au maintien de l’ordre et à l’oppression d’une population musulmane considérée comme une menace pour la sécurité.
Pourtant, la géopolitique fait d’étranges compagnons de lit. Israël étant un allié indéfectible des États-Unis, la Chine ne voit aucun avantage à prendre le parti d’Israël dans le conflit actuel. Les intérêts de Pékin sont mieux servis en recherchant un avantage en tant que champion de la cause palestinienne.