La réunion de Doha : où étaient les femmes afghanes ?
La récente conférence sur l’Afghanistan organisée à Doha, au Qatar, sous l’égide des Nations Unies et à laquelle ont participé pour la première fois des représentants du régime taliban, a une fois de plus attiré l’attention sur un problème crucial : l’exclusion des femmes afghanes.
Alors que les délégués se réunissaient pour débattre de l’avenir de l’Afghanistan, l’exclusion des femmes de la réunion a été accueillie avec une vive critique. Ces critiques transmettaient un message fort : l’exclusion des femmes afghanes de ces discussions non seulement met en péril le potentiel d’une paix véritable, durable et globale, mais porte également atteinte aux valeurs fondamentales d’égalité et de justice qui devraient constituer la base de tout processus de transition.
Les récentes négociations de Doha, dites « Doha 3 », avaient pour objectif de favoriser le dialogue entre les différentes parties prenantes sur l’avenir de l’Afghanistan. L’omission du point de vue des femmes afghanes constitue un écart flagrant par rapport aux principes énoncés dans la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui souligne l’importance d’inclure les femmes dans les discussions liées à la paix et à la sécurité et soutient leur participation significative.
Les femmes afghanes militantes et les organisations de la société civile ont exprimé leur profonde consternation face à leur exclusion des sessions primaires de la conférence. Mariam (nom d'emprunt), une militante des droits des femmes interrogée, a affirmé que tout discours de fond sur l'avenir de l'Afghanistan est incomplet sans la participation complète et substantielle des femmes, qui ont souffert de manière disproportionnée de la suppression délibérée de leurs droits par les talibans.
La décision de l'ONU d'accéder aux demandes des talibans, y compris l'omission de discussions sur les questions des droits de l'homme, a accru les appréhensions des femmes afghanes. Elle est perçue comme une violation des engagements de l'ONU de défendre les droits de l'homme et de garantir la participation de perspectives diverses aux efforts de reconstruction post-conflit.
Les femmes afghanes ont exprimé leurs inquiétudes à l'approche de la conférence, critiquant l'ONU pour avoir invité les talibans et pour avoir fait des compromis en excluant les femmes afghanes de la participation et en omettant les droits des femmes de l'ordre du jour. Mursal, une autre femme interrogée, a soutenu que toute discussion sur les questions cruciales en Afghanistan serait vaine si l'on n'abordait pas les droits de l'homme et le droit des femmes à poursuivre des études et à travailler.
Depuis leur exclusion de la conférence, les femmes afghanes ont appelé au boycott de la réunion, estimant que la marginalisation des voix des femmes pourrait légitimer les politiques oppressives et la discrimination fondée sur le sexe des talibans. Fatima, une autre femme interrogée, a souligné que l'échec de la communauté internationale à garantir la participation des femmes afghanes pourrait avoir des conséquences durables sur l'avenir du pays, en particulier pour la population féminine qui a été la cible de l'oppression systématique et des politiques discriminatoires des talibans depuis leur prise de pouvoir en août 2021 et pendant leur précédent régime.
Sadaf, une militante des droits de l'homme, a émis des objections à la décision de l'ONU d'inclure les talibans à la réunion de Doha plutôt que de les tenir responsables de leurs actes contre les femmes et les filles afghanes. Elle a affirmé que la situation des femmes en Afghanistan constituait la crise des droits des femmes la plus grave au monde et qu'elle continuait de se détériorer chaque jour.
Il est indéniable que les femmes afghanes ont joué un rôle essentiel dans les initiatives locales visant à instaurer la paix et la stabilité dans leur pays. Elles ont fait preuve d’une résilience et d’une détermination sans faille dans les efforts liés à l’éducation, à la défense des soins de santé, à la gouvernance et à la société civile. L’exclusion des femmes afghanes du processus de construction de l’avenir du pays constituerait une grave injustice et un oubli stratégique.
Les négociations de Doha ont laissé passer une occasion cruciale pour l'ONU de démontrer sa détermination à défendre les principes de l'implication des femmes dans les processus de paix, de sécurité et de reconstruction post-conflit. En marginalisant les femmes afghanes, l'ONU risque de perpétuer les injustices qu'elle cherche à combattre et de compromettre le potentiel d'une paix durable et globale en Afghanistan.