Pakistan Runs Out of Patience With Afghan Taliban

Le Pakistan manque de patience face aux talibans afghans

Une famille de réfugiés afghans rentre en Afghanistan par le poste frontière pakistanais de Torkham, à l’est de Kaboul, en Afghanistan, le 11 mars 2015.

Crédit : AP Photo/Rahmat Gul, dossier

Le Pakistan a ordonné à des millions d’immigrants illégaux vivant dans le pays de quitter le pays d’ici le 30 octobre. Cette décision a suscité des inquiétudes quant au sort d’environ 1,7 million de réfugiés afghans sans papiers résidant au Pakistan.

Afin d’éviter des troubles et des effusions de sang dans leur propre pays, des millions d’Afghans traversent la frontière depuis des décennies. Beaucoup vivent au Pakistan depuis des années. Plus récemment, des milliers de personnes ont traversé la frontière pakistanaise après que les talibans afghans ont pris le contrôle de Kaboul en août 2021.

Pendant des années, le Pakistan a généreusement accueilli ces réfugiés malgré le prix à payer pour sa sécurité et sa stabilité financière.

Le projet du Pakistan visant à expulser les immigrants illégaux a suscité les critiques des talibans afghans, qui affirment que les réfugiés ne se livrent pas à des activités violentes. « Le comportement du Pakistan à l’égard des réfugiés afghans est inacceptable », a déclaré Zabiullah Mujahid, porte-parole officiel du gouvernement afghan. « La partie pakistanaise devrait reconsidérer son plan. »

Le moment choisi par le Pakistan pour prendre sa décision est remarquable. Cela coïncide avec l’introduction par le pays de conditions commerciales strictes avec l’Afghanistan.

Les mesures économiques visent à limiter les dommages causés à l’économie nationale et au secteur extérieur en raison de l’utilisation abusive de l’Accord commercial de transit afghan (ATTA). Les douaniers pakistanais estiment que certains produits importés par l’Afghanistan via les ports pakistanais dans le cadre de l’ATTA sont renvoyés illégalement au Pakistan. La contrebande de ces produits au Pakistan a donné lieu à des évasions fiscales de plusieurs milliards de dollars, à un moment où l’économie pakistanaise est déjà soumise à des tensions extrêmes.

L’abus de l’ATTA a eu des effets négatifs sur l’économie pakistanaise, obligeant le gouvernement à prendre des mesures correctives. En appliquant des conditions commerciales plus strictes, le Pakistan semble prendre des mesures proactives pour protéger ses intérêts économiques. Le Pakistan a déjà constaté l’impact positif de sa répression contre les routes de contrebande afghanes et contre les personnes qui se trouvaient derrière ces routes ; en septembre, la roupie pakistanaise est devenue la monnaie la plus performante par rapport au dollar américain.

L’impact et l’ampleur de la contrebande liée à l’Afghanistan, ainsi que l’échec des talibans afghans à travailler avec Islamabad pour répondre aux préoccupations de sécurité de ce dernier concernant le Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP), ont laissé perplexes les décideurs politiques pakistanais.

La décision d’expulser les immigrants illégaux et de restreindre leurs activités illégales intervient à un moment où les attaques militantes, menées principalement depuis l’Afghanistan, se sont multipliées au Pakistan.

Selon de récents rapports des services de renseignement, des ressortissants afghans auraient rejoint les rangs du TTP, allant à l’encontre des ordres de leur commandant suprême, Hibatullah Akhundzada, et facilitant activement les opérations du groupe militant contre le Pakistan. Le ministre de l’Intérieur du Pakistan a récemment révélé que 14 des 24 attentats-suicides survenus au Pakistan en 2023 impliquaient des citoyens afghans. En outre, l’inspecteur général de la police (IGP) de Khyber Pakhtunkhwa, Akhtar Hayat Khan, a déclaré que 75 % des attentats suicide commis dans la province lors de la dernière vague de terrorisme concernaient des ressortissants afghans.

Ces développements signifient essentiellement qu’il est peu probable qu’Islamabad réponde avec sympathie à l’appel des talibans afghans au Pakistan de ne pas expulser ni maltraiter les immigrants illégaux. De plus, personne à Islamabad n’est prêt à accepter l’affirmation de Kaboul selon laquelle les citoyens afghans ne sont pas complices des atteintes à la sécurité du Pakistan.

Aucun pays au monde n’accepte des résidents sans papiers, quel que soit leur statut, susceptibles de compromettre leur sécurité, et le Pakistan prend les précautions appropriées pour sauvegarder ses intérêts en expulsant les réfugiés.

Les talibans afghans ne peuvent pas s’attendre à la bonne volonté du Pakistan lorsqu’ils abritent des groupes militants comme le TTP qui mènent d’innombrables attaques au Pakistan depuis des années.

Il est temps que les talibans afghans réalisent que l’époque où ils abritaient sans conséquences le TTP et d’autres organisations militantes le long de la frontière pakistanaise est révolue depuis longtemps. Le Pakistan n’est plus disposé à engager des discussions avec le TTP. Les seules options restantes sont la reddition ou un accord raisonnable qui pourrait mettre le TTP dans une position où il ne constitue plus une menace pour le Pakistan.

Depuis plus de deux ans, le Pakistan tente de discuter du TTP avec les talibans afghans, sans résultat. Le Pakistan a également fait une série de concessions économiques pour aider l’économie afghane, mais toutes ces mesures semblent avoir été une erreur alors que Kaboul continue d’ignorer les inquiétudes du Pakistan.

Le refus obstiné du régime taliban de travailler avec le Pakistan sur les questions de sécurité, la faiblesse du régime des visas, le sort des immigrants illégaux et d’autres questions liées au commerce semblent être les forces motrices derrière les récentes mesures punitives du Pakistan.

Il est évident que le Pakistan est désormais prêt à utiliser tous les moyens disponibles pour punir les talibans, même s’il n’a pas encore ciblé les refuges du TTP en Afghanistan.

Les restrictions imposées par le Pakistan pourraient avoir de graves conséquences sur l’économie enclavée de l’Afghanistan, qui dépend du Pakistan pour son commerce international. Si Kaboul continue de protéger le TTP aux dépens de l’économie et de la stabilité du Pakistan, ce dernier sera obligé de prendre des mesures encore plus strictes.

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