La Papouasie-Nouvelle-Guinée traverse une crise de gouvernance – et l’Australie a contribué à la mettre en place
Juste avant la récente visite du pape François en Papouasie-Nouvelle-Guinée, des stands de vente de noix de bétel, une substance intoxicante locale, ont été fermés. Si cette mesure n’est pas bonne pour les nombreux petits commerçants qui dépendent de ce commerce à petite échelle pour survivre, elle ne mérite pas, à première vue, beaucoup d’attention. Mais elle témoigne d’un phénomène bien plus grave : l’état désespéré de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et le rôle de l’Australie dans son déclin.
Le pape est parti, mais la fermeture des stands de noix de bétel – et la disparition soudaine des revenus de subsistance de leurs propriétaires – pour embellir les rues du pays pour le pape en visite, reste une réalité. C'est un symbole des écarts qui se creusent en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Une élite déconnectée de la réalité, composée de politiciens et d'hommes d'affaires de haut rang, s'éloigne de plus en plus d'une population qui souffre d'une augmentation vertigineuse du coût de la vie, d'un taux de criminalité parmi les plus élevés au monde et d'une corruption rampante.
Récemment, le Opposition de la Papouasie-Nouvelle-Guinée Le rapport a dressé une longue liste des déficits de financement auxquels le gouvernement Marape est confronté. Il s'agit d'un rapport non officiel sur la mi-parcours de la période budgétaire actuelle.
Selon ces chiffres vérifiables, les dépenses réelles du gouvernement – les fonds versés à ce jour – en médicaments sont en baisse de 70 % par rapport aux projections budgétaires de 2023. Selon les mêmes calculs, le ministère public a reçu 80 % de moins que le budget qui lui est alloué, l'éducation est en baisse de 77 % et les dépenses de santé sont en baisse de 73 %.
Le recensement national de 2024, le premier depuis 11 ans, devait se terminer en juillet. En raison de la mauvaise gestion et de l'incompétence manifeste du gouvernement, il a été repoussé à 2025.
Alors que 150 millions de kina de Papouasie-Nouvelle-Guinée (37,8 millions de dollars américains) ont été prévus dans le dernier budget pour le processus de recensement, seulement 24 millions de kina, soit 16 % du total, ont été distribués.
On pourrait soutenir que le budget de la Papouasie-Nouvelle-Guinée est sous pression et ne peut pas faire face à ses obligations. Il est vrai que les mesures de lutte contre la COVID-19 ont porté un coup dur à l'économie nationale et que le pays a du mal à se relever.
Pourtant, le Premier ministre James Marape a trouvé suffisamment de fonds pour son propre cabinet et pour le Conseil exécutif national. Ensemble, ils ont reçu une allocation supplémentaire de 31,8 millions de kina par rapport aux fonds prévus pour cette année. C'est plus du double du budget alloué – et nous n'en sommes qu'à la moitié de l'exercice financier.
Marape est resté silencieux sur les accusations, offrant seulement de faibles explications autour de «erreurs de frappe » et » problèmes techniques « .
Face à ces allégations de fonds mal alloués, il convient de noter que le gouvernement australien a prêté 2,5 milliards de dollars australiens au gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée, les versant directement sur le compte bancaire du gouvernement, pour être dépensés où il le souhaite, au cours des quatre derniers exercices financiers.
Le budget total de la PNG était de 27,3 milliards de kina (10,1 milliards de dollars australiens) en 2023.
L'attribution de prêts australiens à des fins de « soutien budgétaire » implique que ces fonds ne bénéficient que d'une transparence ou d'une responsabilité limitées, voire inexistantes. On ignore souvent où ces fonds finissent exactement.
Ces prêts s'ajoutent aux 2,4 milliards de dollars australiens fournis par Canberra entre 2022-23 et 2024-25 via les dépenses d'aide au développement d'outre-mer et le don supplémentaire d'un Prêt de 600 millions de dollars australiens pour une équipe proposée de la Ligue nationale de rugby de Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Près d'un tiers des subventions australiennes de l'année en cours, soit plus de 200 millions de dollars australiens, ont été destinées à la « gouvernance », ce qui signifie que l'Australie paie le gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée pour qu'il essaie de ne pas détourner l'argent qui lui est donné.
Alors que les Australiens sont confrontés à une hausse du coût de la vie, à une flambée des coûts de chauffage en hiver, à une crise de l'accessibilité au logement et à d'autres problèmes, il est légitime de se demander si ces fonds ne pourraient pas être mieux dépensés aux États-Unis. C'est particulièrement pertinent lorsqu'on ne sait pas exactement où cet argent va en Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Les Papouasie-Néo-Guinéens, de leur côté, sont naturellement perplexes quant à la manière dont l’Australie – la « famille » autoproclamée de Papouasie-Nouvelle-Guinée – a pu gaspiller des sommes aussi importantes pour des résultats inutiles et souvent inexistants.
Canberra n'est pas seule dans ce carnaval de lLe Fonds monétaire international a récemment approuvé un prêt de 486 millions de kina, également destiné au « soutien budgétaire ».
Il est temps de dénoncer l’utilisation des fonds publics en Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui demeure un environnement de dépenses excessives et d’opacité chroniques.
L’utilisation de fonds publics pour financer le gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée, dans le cadre d’un exercice géopolitique, a non seulement des répercussions sur la vie sociale et politique en Papouasie-Nouvelle-Guinée, mais aussi sur l’Australie. Ces fonds pourraient certainement être mieux utilisés dans des projets australiens, ou au moins dans des projets durables, transparents et axés sur les populations en Papouasie-Nouvelle-Guinée.
L’ensemble des relations financières de l’Australie avec la Papouasie-Nouvelle-Guinée mérite d’être sérieusement réexaminé afin de garantir que les Papouasie-Néo-Guinéens et les Australiens obtiennent un meilleur accord.