Marriage of Convenience: How the European Far Right and Far Left Converged on China

Mariage de convenance : comment l’extrême droite et l’extrême gauche européennes ont convergé vers la Chine

Certains partis politiques européens d’extrême droite et d’extrême gauche ont découvert un domaine de convergence improbable : un certain alignement avec la Chine. Bien que cela ne soit pas universel dans tous ces spectres idéologiques, certains partis et individus au sein des deux groupes ont exploité des arguments qui se chevauchent pour remettre en question la position plus critique récemment adoptée par plusieurs États membres de l’UE et la Commission européenne à l’égard de Pékin. Cet alignement émergent, bien que nuancé et varié en intensité, a des implications potentielles sur les relations Chine-UE et sur la dynamique politique plus large en Europe.

L'étude sur les partis politiques extrêmes au Parlement européen publiée en avril 2024 par le Association pour les Affaires Internationales (OMA) a révélé qu'en matière de droits de l'homme, l'extrême droite minimise souvent l'importance des violations commises par la Chine. Certains admettent que ces problèmes existent mais soutiennent que l’Europe devrait donner la priorité à ses intérêts économiques et stratégiques. De plus, les partis d’extrême droite font souvent écho à la rhétorique de Pékin sur la souveraineté, soutenant les demandes chinoises d’un contrôle incontrôlé dans des régions comme Hong Kong et le Xinjiang. Cet alignement reflète leurs idéologies nationalistes, mettant l’accent sur la non-ingérence et la souveraineté sur les politiques interventionnistes.

Les partis d'extrême droite tels que l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) en Allemagne et le Rassemblement national en France donnent la priorité au pragmatisme économique et à la souveraineté nationale. Ces partis soutiennent que le découplage de la Chine ou l’imposition de sanctions économiques nuit aux économies européennes, plaidant plutôt pour une coopération économique plus forte avec Pékin. Ils considèrent la Chine comme un partenaire commercial crucial et un contrepoids à l’influence américaine, critiquant fréquemment l’UE pour son alignement sur Washington sur les questions de politique étrangère.

Les partis d’extrême gauche abordent la Chine à partir d’un cadre idéologique totalement différent, enraciné dans les critiques de l’impérialisme occidental et du néolibéralisme. Ils accusent l’UE et les États-Unis d’hypocrisie, utilisant les droits de l’homme comme outil géopolitique pour affaiblir la Chine tout en ignorant leurs propres échecs. L'extrême gauche considère le modèle économique chinois dirigé par l'État comme une alternative au paradigme capitaliste néolibéral, louant l'accent mis sur la planification et le développement de l'État.

Sceptiques à l’égard des politiques militarisées, les groupes d’extrême gauche prônent le dialogue et la coopération plutôt que la confrontation. Ils résistent aux efforts visant à isoler Pékin, arguant que de telles mesures exacerbent les tensions mondiales et entravent les progrès sur des questions cruciales comme le changement climatique.

Perspectives partagées et sensibilisation chinoise

Malgré leurs différences idéologiques, l’extrême droite et l’extrême gauche partagent un terrain d’entente dans leur opposition aux politiques affirmées de l’UE à l’égard de la Chine. Tous deux soutiennent que ces mesures nuisent souvent davantage aux intérêts européens qu’à Pékin. En outre, ils résistent aux motions de l’UE ciblant le bilan de la Chine en matière de droits de l’homme ou les allégations d’ingérence étrangère, les présentant comme des atteintes à la souveraineté ou comme une distraction des défis internes de l’Europe.

La Chine est parfaitement consciente de cette dynamique politique et a eu recours à diverses stratégies pour courtiser les individus des partis politiques extrémistes en Europe. Cela a été récemment démontré par un scandale d’espionnage impliquant l’eurodéputé allemand Maximilian Krah (anciennement de l’AfD). En avril 2024, l'assistant parlementaire de Krah, Jian Guo, était arrêté sur des allégations d'espionnage au profit de la Chine. Guo est accusé d'avoir transmis des informations sensibles du Parlement européen aux services de renseignement chinois et d'avoir surveillé des dissidents chinois en Allemagne. Cet incident a suscité une recherche des bureaux de Krah à Bruxelles et a fait part de ses inquiétudes quant à l'intégrité des institutions démocratiques européennes.

Krah, qui employait Guo depuis 2019, a exprimé sa surprise face aux allégations mais a licencié Guo après son arrestation. Malgré cette controverse, ainsi qu'une allégation selon laquelle il aurait reçu de l'argent de Chaînes de propagande russes, Krah réussi aux élections du Parlement européen de juin 2024.

D’autres techniques consistent à organiser des voyages entièrement financés en Chine et à fournir un soutien, y compris financier, aux médias marginaux locaux et aux comptes de réseaux sociaux pour amplifier les récits pro-chinois et élever la voix des représentants d’extrême droite et d’extrême gauche. La Tchéquie offre un laboratoire intéressant pour étudier le phénomène.

Les efforts d’influence de la Chine en Tchéquie, en particulier par le biais de médias comme la radio publique chinoise China Radio International (CRI), révèlent un stratégie ciblée de tirer parti des voix et des groupes politiques marginaux tchèques pour propager les récits de Pékin. Le CRI a accueilli des personnalités controversées, telles que d’anciens responsables du Parti communiste et des hommes politiques de droite, pour amplifier les critiques à l’égard du gouvernement tchèque et promouvoir un sentiment anti-occidental. Ces personnalités, qui viennent souvent d’extrémités opposées du spectre politique, partagent un scepticisme commun à l’égard des États-Unis et de l’UE, que Pékin exploite pour aligner sa rhétorique sur les intérêts chinois.

Par exemple, le CRI a présenté Jaroslav Čejka, un ancien responsable du Parti communiste, qui a qualifié l’élection du président Petr Pavel de début de « totalitarisme de droite ». De même, un éditorial de Jindřich Rajchl, homme politique d'extrême droite, a critiqué la communication de Pavel avec le président taïwanais, la décrivant comme une ingérence orchestrée par les États-Unis.

Sur Facebook, le contenu du CRI trouve du terrain parmi les groupes d’extrême gauche et d’extrême droite. Ces groupes, souvent marginaux, amplifient les publications sur des sujets tels que les événements politiques chinois ou les récits critiques à l’égard des actions de l’UE ou de l’OTAN. Les publications partagées par des entités telles que le Parti communiste de Bohême et Moravie ou des groupes nationalistes et conservateurs témoignent d'un engagement significatif, démontrant à quel point le contenu chinois trouve un écho auprès des segments polarisés de la société tchèque.

La Chine utilise également des plateformes vidéo en ligne locales pour intégrer discrètement ses messages. Un exemple notable est la chaîne YouTube tchèque «Le monde à travers l'œil du raptor» (Très bien Raptora), dirigé par Žarko Jovanović, un militant tchèque d'origine serbe connu pour ses positions pro-russes et son histoire de propagation désinformation. de Jovanović Télévision Rapace a une audience importante sur Facebook, avec 127 000 abonnés, même si sa chaîne YouTube ne rassemble qu'une audience modeste de plusieurs dizaines d'abonnés. Malgré la portée limitée de YouTube, Jovanović utilise la plateforme pour solliciter des fonds. cotisations à sa télévision sur Internet auprès de ses partisans, tirant parti de leur soutien pour soutenir les opérations. Jovanović lui-même a notamment été confronté à difficultés financièresce qui souligne la vulnérabilité de ces individus aux influences extérieures. Ces pressions personnelles et financières les rendent susceptibles de coopérer avec des puissances étrangères malveillantes, désireuses d’exploiter les alignements idéologiques ou le désespoir financier pour faire avancer leurs discours.

La chaîne de Jovanović « Le monde à travers Raptor's Eye » diffuse des messages pro-chinois alignés sur les intérêts stratégiques de Pékin, décrivant par exemple les sanctions de l'UE contre les voitures chinoises comme étant davantage nocif en Europe qu'en Chine. Un autre vidéo affirme que la vie des Tibétains s'est considérablement améliorée grâce au « programme de réinstallation et de développement » du gouvernement chinois. La chaîne réutilise maladroitement le contenu des médias d'État chinois comme CGTN, en ajoutant des sous-titres tchèques et en employant des modérateurs générés par l'IA d'une manière qui semble amateur et grossière. Cette intégration maladroite, bien que manquant de sophistication, diffuse néanmoins efficacement les récits de Pékin auprès du public local. Surtout, la chaîne ne divulgue pas l’origine de ses contenus, obscurcissant le rôle de l’influence étrangère et soulevant de vives inquiétudes quant à la manipulation secrète de l’opinion publique par des tactiques trompeuses.

Une capture d'écran du contenu « Le monde à travers l'œil du raptor » présentant du contenu chinois raconté par un modérateur généré par l'IA.

Que regarder

La convergence de certains partis politiques d’extrême droite et d’extrême gauche en Europe avec la Chine pose des défis non seulement aux relations Chine-UE mais aussi aux institutions démocratiques européennes. À mesure que les divisions idéologiques se creusent et que les opérations d’influence étrangère deviennent plus sophistiquées, le risque de manipulation augmente, menaçant à la fois la stabilité politique et la confiance du public.

À l’avenir, il est crucial de surveiller l’évolution de la rhétorique et des tactiques employées par ces extrêmes politiques ainsi que leurs liens avec des acteurs extérieurs comme la Chine. La transparence des sources médiatiques, une surveillance plus stricte de l’influence étrangère et une compréhension nuancée des dynamiques idéologiques en jeu seront essentielles pour atténuer l’impact de ces relations. Alors que l’Europe est aux prises avec ses divisions internes, la capacité à sauvegarder l’intégrité démocratique contre les manipulations secrètes restera un test critique de sa résilience.

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