Le chemin de fer à grande vitesse thaïlandais : sur la voie rapide vers des liens avec la Chine, mais à quel prix ?
Le 19 octobre, alors qu’il était à Pékin pour le Forum de la Ceinture et de la Route, le Premier ministre thaïlandais Srettha Thavisin a exprimé l’engagement de son gouvernement à accélérer la construction du chemin de fer Chine-Thaïlande, longtemps retardé. « La logistique est l’un des problèmes importants pour la Thaïlande en ce qui concerne la coopération dans le cadre de la BRI », a-t-il déclaré dans une interview accordée à Xinhua avant sa visite. Il a promis que la Thaïlande « renforcerait la connexion entre ses chemins de fer nationaux et le chemin de fer Chine-Laos, un projet phare de l’Initiative de la Ceinture et de la Route (BRI) dans la région ».
Cette déclaration semble signaler le ferme engagement de la Thaïlande à accélérer la construction d’un projet qui constitue un élément clé de la BRI. Le projet, qui reliera Bangkok à la ville de Nong Khai, à la frontière avec le Laos, promet de renforcer la logistique et la connectivité tant en Thaïlande qu’au niveau régional. Cependant, alors que la Thaïlande poursuit ce projet, des inquiétudes subsistent quant au coût potentiel, tant en termes économiques que politiques, et à l’impact sur la souveraineté nationale.
En 2016, la Thaïlande et la Chine ont signé un accord pour le projet de train à grande vitesse Bangkok-Nong Khai, reliant Bangkok à Kunming via le Laos. La Thaïlande financerait le projet elle-même, tandis que la Chine fournirait son expertise en matière de technologie et de système ferroviaire. Malgré des retards répétés dans la construction, le précédent gouvernement thaïlandais s’est engagé l’année dernière à achever le projet d’ici 2028. Après des revers répétés liés à la pandémie, la visite de Wang Yi en Thaïlande en juillet 2022 visait à inciter la Thaïlande à accélérer la connexion entre Bangkok et Kunming.
Même si Srettha déclare avoir l’intention d’aller de l’avant avec le projet ferroviaire, quelle est la probabilité qu’il soit construit sous le nouveau gouvernement thaïlandais ? Le chemin de fer est un élément important de la BRI, et les responsables chinois ont déjà exprimé leur frustration face à la lenteur des progrès réalisés jusqu’à présent. Pour la Thaïlande, la participation à la BRI offre le potentiel d’une intégration économique et d’une connectivité accrues, non seulement avec la Chine mais aussi avec les pays voisins de la région. En accélérant le chemin de fer Chine-Thaïlande, le gouvernement de Srettha, qui s’est engagé à se concentrer avant tout sur l’amélioration de l’économie thaïlandaise, envoie un signal clair sur son engagement à poursuivre ces objectifs.
De plus, la décision de relier Bangkok à la frontière laotienne via Khon Kaen et Nong Khai souligne la reconnaissance par le gouvernement du rôle central que jouent ces provinces en tant que plaques tournantes du transport dans le nord-est de la Thaïlande. En établissant des liaisons ferroviaires à grande vitesse vers ces zones, l’administration vise à débloquer leurs atouts inexploités et à stimuler le développement régional. Essentiellement, ce projet est considéré comme un catalyseur pour stimuler la croissance économique et favoriser le progrès dans la région.
Cependant, donner la priorité à un projet d’une telle envergure nécessite une gestion méticuleuse et une évaluation des risques afin de surmonter les inquiétudes du gouvernement précédent à propos du projet.
Alors que les partisans du projet soutiennent qu’il pourrait entraîner des avantages mutuels, notamment une intégration économique et des transferts de technologie améliorés, la décision de la Thaïlande de se lier plus étroitement au sud de la Chine pourrait avoir des implications sur la souveraineté nationale et avoir des conséquences budgétaires à long terme. La Thaïlande doit répondre aux préoccupations concernant les vulnérabilités économiques potentielles résultant d’une implication financière importante de partenaires étrangers, en particulier lorsqu’elle traite avec une grande puissance comme la Chine. De nombreux autres participants à la BRI ont également dû faire face à cet exercice d’équilibre.
La décision d’établir une liaison ferroviaire à grande vitesse de Bangkok à la frontière laotienne via Khon Kaen et Nong Khai souligne l’importance stratégique de ces provinces dans le réseau de transport du nord-est de la Thaïlande. Bien que le projet vise à stimuler la croissance économique et le développement régional, il a suscité d’importantes inquiétudes. Ils s’inquiètent de l’approfondissement du partenariat entre la Thaïlande et la Chine et de l’intégration accrue qui en résulte avec son voisin du sud. Ces préoccupations englobent des inquiétudes quant aux impacts potentiels sur la souveraineté nationale thaïlandaise, des doutes quant à la nécessité du projet en raison de la liaison ferroviaire existante avec Nong Khai, et des inquiétudes quant à l’implication financière de partenaires étrangers, en particulier de la Chine, qui pourrait conduire à une accumulation de dettes et à des vulnérabilités économiques.
En outre, le projet fait l’objet de critiques sur plusieurs fronts, notamment ses conséquences environnementales et sociales, la nécessité d’une plus grande transparence dans son exécution et le potentiel de tensions géopolitiques découlant de liens plus étroits avec la Chine. À ces préoccupations s’ajoutent des conflits politiques et bureaucratiques nationaux, enracinés dans les priorités et intérêts divergents des différentes parties prenantes. Pour résoudre efficacement ces problèmes, le gouvernement thaïlandais doit procéder à des évaluations approfondies des risques, maintenir une communication transparente avec le public et veiller à ce que les avantages escomptés, tels que l’intégration économique, le transfert de technologie et le développement régional, l’emportent sur les inconvénients potentiels. Trouver un équilibre entre la promotion de la croissance économique et la sauvegarde de la souveraineté dans un contexte d’implication étrangère substantielle n’est pas un défi propre à la Thaïlande mais partagé par de nombreux participants à l’Initiative la Ceinture et la Route (BRI). De plus, les inquiétudes s’étendent aux aspects financiers du projet. Les projets ferroviaires à grande vitesse sont connus pour leurs coûts élevés et leurs risques de dépassement de budget. Même si les avantages économiques d’une meilleure connectivité pourraient être importants, ils doivent être mis en balance avec le fardeau que représente le financement de la construction du chemin de fer. La capacité de la Thaïlande à gérer ces obligations financières sans compromettre sa santé budgétaire sera un facteur déterminant.
Au 17 août, 23,95 pour cent du premier tronçon de la voie ferrée, de Bangkok à Nakhon Ratchasima, étaient achevés. Cependant, il a été confronté à des défis importants, notamment des retards dans l’acquisition des terrains et des changements dans la structure du projet, qui ont eu un impact sur son avancement. Le gouvernement précédent avait pris plusieurs engagements pour relancer le projet, mais ces promesses sont restées lettre morte, contribuant ainsi à la stagnation actuelle du projet.
Avec un nouveau gouvernement au pouvoir à Bangkok, doté d’un programme économique fort, il existe peut-être une opportunité de faire avancer les choses. Mais quelle est la priorité du projet ferroviaire pour l’administration de Srettha ? Même si les commentaires du dirigeant thaïlandais peuvent suggérer qu’il soutient le projet et reconnaît le potentiel du chemin de fer pour stimuler la croissance économique, il reste à voir s’il pourra surmonter les inquiétudes financières et politiques qui s’accrochent au projet depuis 2016.
Donner la priorité au projet implique que le gouvernement thaïlandais doit répondre aux préoccupations concernant les vulnérabilités économiques potentielles découlant d’engagements financiers importants. Il n’existe actuellement aucun problème immédiat, mais des défis potentiels pourraient surgir à l’avenir, notamment dans le contexte du maintien d’une relation équilibrée avec les grandes puissances comme la Chine lors des échanges avec des partenaires étrangers. La Thaïlande est le seul investisseur dans le projet ferroviaire à grande vitesse, la Chine apportant son soutien technologique. Le projet est principalement financé par la Thaïlande, en utilisant une combinaison de sources de financement, notamment des prêts chinois.
Le soutien de Srettha au projet ferroviaire Chine-Thaïlande est évident, mais le gouvernement est confronté à des défis financiers et politiques complexes pour le mener à bien. Les coûts substantiels du projet et les éventuels dépassements budgétaires doivent être gérés avec soin pour préserver la santé budgétaire de la Thaïlande. De plus, le projet soulève des inquiétudes quant à la souveraineté et à l’influence, obligeant la Thaïlande à gérer avec prudence ses relations avec la Chine et d’autres partenaires étrangers. En conséquence, l’incertitude entoure l’avancement du projet. Le soutien de Srettha est un signe positif, mais jusqu’à ce que des développements concrets se produisent, le sort du chemin de fer reste incertain.